LA MAISON DE BERNADA ALBA
“Écrite en 1936, peu avant l’assassinat de García Lorca, La Maison de Bernarda Alba nous plonge au cœur d’un village andalou brûlant de tensions. Bernarda, veuve inflexible, impose à ses cinq filles huit ans de deuil : huit années d’enfermement, de rites étouffants, de désirs muselés. Dans cette atmosphère où chaque souffle semble surveillé, le désir, la frustration et la rivalité s’intensifient jusqu’à l’inévitable explosion, attisée par l’arrivée du mystérieux et irrésistible José le Romano.
L’univers rural andalou n’est pas un simple décor : c’est une force qui pèse sur toutes et tous. Traditions inflexibles, regard perçant du voisinage, honneur familial omniprésent… La maison devient une prison blanche, un espace clos où l’on entend battre le cœur des femmes que l’on tente de faire taire.
Le patriarcat règne partout. Même en l’absence hommes dans la maison, leur pouvoir est là, dans les murs, dans les mots, dans la peur permanente du scandale. Pour ces femmes, le mariage est présenté comme l’unique échappatoire, tandis que leur désir, leur liberté, leur voix sont brutalement contenus. Bernarda, gardienne de cet ordre oppressant, incarne un système qui broie celles qu’il prétend protéger.
En arrière-plan, on devine une Espagne au bord du basculement, pré-franquiste, déjà marquée par l’autoritarisme, le conservatisme et l’ordre moral qui étouffe les élans de vie. La maison de Bernarda, c’est aussi le pays lui-même : une société qui se referme, au risque de s’aveugler.
Avec cette pièce fulgurante, Federico García Lorca, poète, dramaturge, amoureux de la liberté, dénonce la répression sociale et signe un chant tragique pour toutes les vies empêchées.
Un huis clos incandescent où chaque geste, chaque souffle, chaque silence annonce la tragédie.”